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Natif ou non : débat sur les compétences du formateur en langue?

Si vous cherchez un formateur pour apprendre une langue étrangère, intuitivement, vous pensez qu’un natif incarnera l’idéal du professeur de langue.

Prenons l’anglais. Considérez vous que le professeur d’anglais idéal est né à Londres ou à New York? Alors que vous allez vous installer pendant quelques années à Singapour pour un emploi dans une entreprise internationale. Ou bien, la banque pour laquelle vous travaillez va vous envoyer régulièrement superviser sa filiale en Afrique du Sud.

D’où est natif votre professeur idéal? Et cela est-il gage d’une formation efficace?

L’enseignement des langues étrangères est en effet un domaine qui nécessite une compréhension des fonctionnements de la langue, de la culture, et des méthodologies d’enseignement, ce qui va au-delà de la capacité à parler une langue, qu’elle soit première ou seconde. Explorons la question.

Compétences linguistiques

Le locuteur natif possède une maîtrise implicite de la langue, y compris de ses nuances, de son argot et de ses expressions idiomatiques, ce qui lui permet d’apporter des connaissances très précises selon les contextes de communication. Cependant, s’il n’a pas de formation linguistique, il pourrait rencontrer des difficultés à expliquer les concepts grammaticaux de manière claire ou à faire comprendre le sens d’un nouveau mot. À l’inverse, le locuteur non natif a une connaissance explicite des structures et du lexique qui lui permet d’anticiper les difficultés ou les erreurs fréquentes.

Compétences culturelles

Le locuteur natif a une compréhension profonde de la culture du pays dans lequel il vit ou a vécu et peut faire référence à des situations authentiques. Pour le locuteur non natif, il faudra avoir séjourné longtemps dans le pays pour pouvoir s’imprégner en profondeur de la culture et garder le contact à travers des lectures et différents médias. Mais attention, un locuteur natif francophone français ne pourra pas forcément connaître la culture québécoise ou celle d’un autre pays de la Francophonie.

Compétences pédagogiques

Enfin, que l’enseignant soit un locuteur natif ou non, l’absence de compétences pédagogiques entraîne plusieurs risques : celui de ne pouvoir être en capacité d’évaluer le niveau d’entrée en formation de l’apprenant, de ne pouvoir proposer une formation pertinente et adaptée au besoin de ce dernier ou encore de ne pas mettre en œuvre des activités favorisant un engagement actif de l’apprenant. Pour l’enseignant locuteur non natif, le sentiment d’insécurité linguistique, ou pour reprendre une expression de développement personnel – le syndrome de l’imposteur – peut lui faire craindre de ne pas être à la hauteur et affecter sa confiance en tant qu’enseignant.

Conclusion

La question du locuteur natif vs non natif est bien plus complexe qu’il n’y paraît. En effet, un enseignant locuteur français ne pourra connaître l’ensemble des variantes régionales utilisées dans l’ensemble des pays de la Francophonie, pas plus que la diversité des cultures. Par ailleurs, la difficulté à recruter pour certaines langues amène à recruter des locuteurs natifs qui n’ont aucune formation en pédagogie et qui auront par conséquent des difficultés à animer un cours de langue efficace. La clé réside alors dans le développement de compétences linguistiques, culturelles et pédagogiques des enseignants.

Quelques lectures sur ce sujet:

Les outils du Conseil de l’Europe à la disposition des enseignants de languess étrangères : vers une redéfinition de la compétence professionnelle des enseignants non-natifs, Maria Roussi : https://www.academia.edu/43427299/Les_outils_du_Conseil_de_lEurope_%C3%A0_la_disposition_des_enseignants_de_languess_%C3%A9trang%C3%A8res_vers_une_red%C3%A9finition_de_la_comp%C3%A9tence_professionnelle_des_enseignants_non-natifs

Politique de formation des professeurs de langues en faveur de la diversité, Conseil de l’Europe https://rm.coe.int/politique-de-formation-des-professeurs-de-langues-en-faveur-de-la-dive/1680887838

Enseignant(e) non-locuteur(trice) natif(ve) de la langue qu’on enseigne : avantages, inconvénients et conséquences qui en découlent,  Les reflets du 34è congrès de l’AQEFLS p79 https://cepeo.on.ca/wp-content/uploads/sites/18/2018/09/Reflet_AQEFLS_2014.pdf

Le locuteur natif et son idéalisation : un demi-siècle de critiques, Valelia Muni Toke https://www.persee.fr/doc/hel_0750-8069_2013_num_35_2_3454

Native English-speaking teachers : always the right choice? https://www.britishcouncil.org/voices-magazine/native-english-speaking-teachers-always-right-choice?utm_source=google.com&utm_medium=organic

La mise en œuvre d’objectifs opérationnels dans le cours de langue sur objectif spécifique : une approche actionnelle

personnes passant à l'action
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l’approche actionnelle est définie par le Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues. Elle considère l’apprenant d’une langue comme un acteur social devant accomplir des tâches (qui ne sont pas seulement langagières) dans des circonstances et un environnement donnés, à l’intérieur d’un domaine d’action particulier.

Il est alors pertinent d’utiliser cette approche pour créer des cours de langue sur objectif spécifique (LOS) car elle implique de proposer des activités immergeant l’apprenant dans des situations au plus proche de la réalité qu’il va vivre.

Dans un article précédent, nous avons exploré la définition des objectifs opérationnels et des objectifs pédagogiques dans le cadre de l’enseignement de la langue sur objectif spécifique (LOS). 

Aujourd’hui, nous allons nous concentrer sur les activités que le formateur peut mettre en œuvre pour atteindre ces objectifs, en utilisant des méthodes telles que la pédagogie par projet, l’approche par problème et la simulation globale.

La pédagogie par projet

La pédagogie par projet permet aux apprenants de travailler sur des projets concrets qui reflètent les situations réalistes qu’ils rencontreront dans leur domaine professionnel. Voici comment vous pouvez l’appliquer :

Identifier un Projet Réaliste : Choisissez un projet qui reflète les besoins et les intérêts de vos apprenants, et qui est en lien direct avec leur domaine professionnel.

Définir les Rôles et les Responsabilités : Assignez des rôles spécifiques à chaque apprenant, en fonction de leurs compétences et de leurs intérêts.

Intégrer les Compétences Linguistiques et Culturelles : Assurez-vous que le projet permette de travailler les compétences linguistiques et culturelles nécessaires.

Évaluer et Réfléchir : Encouragez les apprenants à réfléchir sur le processus et à évaluer leurs progrès.

Exemple:

Public cible : étudiants en école de commerce ou marketing.

Niveau B2/C1


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L’approche par problème

L’approche par problème consiste à présenter aux apprenants un problème concret et à les guider dans le processus de résolution. Voici comment vous pouvez l’appliquer :

Présenter un Problème Réaliste : Choisissez un problème qui est pertinent pour le domaine professionnel de vos apprenants.

– Guider la Résolution de Problèmes : Encouragez les apprenants à travailler ensemble pour trouver des solutions, en utilisant la langue cible.

Intégrer les Compétences Linguistiques : Assurez-vous que le processus de résolution de problèmes permette de travailler les compétences linguistiques nécessaires.

Exemple:

Public cible : infirmiers ou infirmières

Niveau : B2/C1


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La simulation globale

La simulation globale est une méthode qui permet aux apprenants de s’immerger dans un environnement simulé qui reflète leur domaine professionnel. Voici comment vous pouvez l’appliquer :

Créer un Environnement Simulé : Développez un scénario qui reflète les situations réalistes que vos apprenants rencontreront.

Assigner des Rôles et des Tâches : Donnez à chaque apprenant un rôle spécifique et des tâches à accomplir dans la simulation.

Intégrer les Compétences Linguistiques et Culturelles : Utilisez la simulation pour travailler les compétences linguistiques et culturelles nécessaires.

Exemple:

Public cible : étudiants de BTS MHR

Niveau: B2/C1


Simulation palace par Sophie B Comazzi

Conclusion

La mise en œuvre d’objectifs opérationnels dans le cours de langue sur objectif spécifique nécessite une approche actionnelle et réaliste. En utilisant des méthodes telles que la pédagogie par projet, l’approche par problème et la simulation globale, vous pouvez créer des activités engageantes et pertinentes qui préparent vos apprenants aux situations réelles qu’ils rencontreront dans leur domaine professionnel.

Ces méthodes encouragent non seulement l’apprentissage actif et collaboratif, mais elles permettent également d’intégrer les compétences linguistiques et culturelles de manière significative et contextuelle. En tant que formateur, votre rôle est de guider vos apprenants à travers ces activités, en veillant à ce qu’ils atteignent les objectifs opérationnels et pédagogiques définis.

Ressources :

L’approche actionnelle définie par le Conseil de l’Europe

Quand le monde du travail peut venir en renfort de la didactique des langues… (2017 : Jean-Jacques Richer)

Simulations globales